6 juillet 2010

La veste de velours rouge de Sylvie



Rouge, elle était, rouge en velours, une petite veste d’un rouge profond.

Pour le « grand mariage », une robe et une veste furent coupées dans une immense pièce de velours achetée au Marché Saint Pierre par ma grand-mère.

La veste s’ajustait parfaitement sur les plis de la belle robe longue. Elle était cintrée avec des boutons recouverts du même velours. Doux et discrets, ces petits cercles sur une mer d’écarlate me captivaient : parfaitement ronds. Du haut de mes cinq ans, j’étais princesse des Neiges.

Quelques années plus tard, la veste fut retaillée pour mon frère qui marchait à peine. Petit page remuant à la cour d’un riche marchand vénitien, il commençait à explorer le monde.

Adolescente, j’achetai une veste de velours rouge : je serais la plus belle pour aller danser le jerk, alors ma mère ressortit la petite veste, celle des mariages…

Je les oubliai toutes deux dans ma penderie, la grande protégeant la petite.

Jusqu’au jour où, des années après, ma fille rentra toute fière du collège, elle avait échangé son blouson contre la veste d’une amie. La veste était identique à la mienne : même velours, même rouge. D’enfant, elle était devenue femme et je ne m’en étais pas aperçue.

Alors, Viviane, toi qui en as une aussi, je l’ai vue l’autre jour, tu étais George Sand parlant affaire, fais attention, je pourrais bien te la piquer pour compléter ma collection…



Chère Sylvie, nous avons en effet découvert que nous avons le même goût pour le velours rouge. Nous partageons aussi le même intérêt pour l’histoire, je suis persuadée que les deux ne sont pas sans lien.

Comme dit dans l’article précédent, sous l’Ancien Régime le rouge est l’archétype de la couleur, la première de toutes les couleurs. Pendant des siècles un beau vêtement est un vêtement rouge. Cela s’explique sans doute par le fait que c’est dans la gamme des rouges que la teinturerie du monde occidental parvient aux meilleurs résultats, aux couleurs les plus stables, les plus éclatantes et les plus nuancées.

Le rouge, couleur du luxe et de l’aristocratie

Déjà dans la Rome impériale, le rouge, qu’on fabrique avec une substance colorante liquide extraite d’un coquillage rare récolté en Méditerranée, le murex, est réservé à l’Empereur et aux généraux. Cette technique se perd avec l’épuisement des principaux gisements de murex de Palestine et d’Egypte. Les teinturiers du Moyen Âge utilisent le kermès des teinturiers ou graines écarlates, un insecte parasite de type cochenille vivant sur le chêne kermès en Espagne et autour de la Méditerranée. La récolte est laborieuse, la fabrication hors de prix. Mélangé à un mordant comme l’étain, le kermès donne le fameux écarlate, spécialité de la famille Gobelin, magnifique, lumineux, résistant. Ces colorants rouges restent chers. Les seigneurs du Moyen Âge continuent donc à porter cette couleur du luxe.

▲Portrait de Charles VII, par Jean Fouquet, vers 1445-1450,
Musée du Louvre sur Wikipedia
Le roi est immortalisé dans un habit de velours écarlate bordé de fourrure ;
tous les jeunes hommes et les nobles,
comme Guillaume Jouvenel des Ursins, chancelier de France,
ou Etienne Chevalier, trésorier, se faisaient ainsi représenter.
(voir les portraits de Jean Fouquet sur le site de la BnF).

Le velours, l’autre distinction du luxe

Le velours est né dans le Cachemire sous le nom de duvet de cygne, puis développé en Perse où les Italiens le découvrent, l’importent et en reprennent la technique. Lié à l’épanouissement de l’industrie de la soie dont il est le plus souvent tissé, le velours se répand dans les grandes villes italiennes de Gênes, Venise, Milan et Florence au XIVe siècle. En 1347, le Grand Conseil de Venise autorise les tisseurs veloutiers à se constituer en corporation, au XVe siècle leur maîtrise est grande comme l’attestent des pièces conservées. En France, ces velours importés d’Italie sont très appréciés, mais on ne sera capable de les tisser qu’à la fin du XVIe siècle.

▲à g. : Portrait de femme à la fenêtre, par Fra Filippo Lippi, vers 1440-1444, The Metropolitan Museum of Art
à dr. : Morceau de velours, Italie, vers 1450, Los Angeles County Museum of Art

▲à g. : Portrait d’Isabelle du Portugal, épouse de Philippe III duc de Bourgogne, Wikipedia
à dr. : Fragment de tissu de velours, Italie, première moitié du XVe siècle,
Agence photographique de la RMN / ph. Gérard Blot

▲à g. : Portrait de jeune femme de profil, par Domenico Veneziano, vers 1465,
Gemälde Galerie, Berlin sur Wikipedia
à dr. : Fragment de velours, Venise (Italie) Los Angeles County Museum of Art

▲à g. : Donatrice en prière (détail), retable par Petrus Christus, 1450-1460, Wikimedia Commons
au centre : Tryptique du jugement dernier, par Hans Memling, 1467-1471, Wikimedia Commons
à dr. : Portrait de Marguerite d'Autriche, par Jean Hey ou le Maître de Moulins,
vers 1490, The Metropolitan Museum of Art

Le velours est un tissage spécifique. Le principe de départ d’un tissage est une chaîne tendue entrecroisée de fils de trame dans le sens de la largeur. Le velours nécessite deux chaînes : la première chaîne de fond qui forme la base et assure la solidité du tissu et une seconde chaîne pour les boucles. Une baguette appelée fer passe entre les deux chaînes. Quand on retire ces fers, le tissu montre sur l’endroit des petites boucles ou arceaux, les poils. On rase à deux millimètres et on aplanit les poils des pannes de velours unis ou cramoisis ; ceux des pannes de velours ciselés sont coupés à différentes hauteurs, réalisant de somptueuses arabesques aux effets changeants, les décors naissent des effets de surface. Dès le XIVe siècle, les décors orientaux animaliers laissent la place à la mode italienne des semis et rinceaux de feuilles et de fleurs stylisées.

▲à g. : Les fiançailles, Ecole de Ferrare, 1470, Gemälde Galerie, Berlin sur Wikipedia
à dr. : Fragments de tissus de velours, Italie, XVe-XVIe siècles,
Agence photographique de la RMN / ph. Franck Raux

La fabrication coûteuse du velours, le savoir-faire et la lenteur de son tissage ainsi que la cherté de ses matériaux de base en font l’étoffe la plus recherchée et la plus luxueuse de la fin du Moyen-Âge et de la Renaissance. Quand Venise délègue en 1502 ses ambassadeurs au mariage du duc de Ferrare avec Lucrèce Borgia, ceux-ci se présentent au public en costume de cérémonie dans la grande salle du Sénat, toute la ville défile pour les admirer ainsi que les deux manteaux rouge cramoisi bordés de fourrure destinés aux jeunes époux. Le velours partage avec le rouge cette notion de luxe aristocratique, quand on est un puissant de ce monde on aime se vêtir de velours rouge « cramoisi ». Ce terme sous-entend, non pas un rouge éclatant et vif comme on le décrit aujourd’hui, mais un velours uni d’une qualité excellente. Les techniques des XIVe et XVe siècles ne permettent pas d’obtenir facilement une grande surface de couleur vraiment unie, l’uni se trouve donc valorisé, économiquement, socialement et symboliquement, une étoffe unie est une étoffe « pure ».

▲à g. : Portrait présumé de Madeleine de Bourgogne (donatrice) sous le portrait de Marie Madeleine,
par le Maître de Moulins, vers 1490-1495, Musée du Louvre sur Wikimedia Commons
au centre : Le tryptique de Sir John Donne de Kidwelly (détail), par Hans Memling, 1478, National Gallery, Londres
à dr. : Tryptique de Jean des Trompes (détail), par Gérard David, 1505,
Musée Groeninge, Brugges sur Wikimedia Commons

On trouve en 1483, dans l'inventaire des biens de Charlotte de Savoie, reine de France èpouse de Louis XI : « une robe de velours cramoisy brun, fourrée de rampens, à un grant gict et collet de janetes de la longueur de la beste » estimée à 35 écus ; « une robe de velours cramoisy brun, fourrée de martres de pais, à grant gict de martres subelines de la longueur de la beste » – qui devaient ressembler à celles des images ci-dessus, ainsi qu’une « une pièce de velours cramoisy de Millen, contenant quatre aulnes et demye ».

▲à g. : Panne de velours rouge à décor floral, Italie, Victoria & Albert Museum
au centre : Velours rouge à décor en soie jaune d'or à décor floral, 1er quart 16e siècle,
Musée national de la Renaissance, Ecouen sur Agence photographique de la RMN / ph. René-Gabriel Ojéda
à dr. : Portrait d’Isabelle de Portugal, reine d’Espagne épouse de Charles Quint, par Le Titien, 1548,
Musée du Prado, Madrid

▲à g. : Portrait de Jane Seymour, par Hans Holbein, 1536-1537, Kunsthistorisches Museum, Vienne sur Wikipedia
à dr. : Portrait d’Anne de Clèves, par Hans Holbein, vers 1539, Musée du Louvre sur Wikipedia
(voir ici le superbe projet de deux créatrices à partir de ce portrait)

▲à g. : Le prince Don Carlos d’Autriche, fils de Philippe II roi d’Espagne, par Alonso Sanchez Coello, 1557,
Musée du Prado, Madrid
à dr. : Pourpoint et chausses, reproduction de costume réalisée au XIXe siècle
dans un tissu fin XVIe - début XVIIe siècle, Espagne, Los Angeles County Museum of Art

Les lois somptuaires

Apparues au XIVe siècle en Italie, puis en France, variables d’une ville à l’autre, des lois somptuaires rappellent qu’on s’habille selon son rang ou selon sa classe. En 1294, Philippe IV de France, dit le Bel, institue des lois somptuaires pour contenir l'extravagance des costumes. Jusqu’au XVIIe siècle, des centaines vont se succéder pour réglementer ou interdire la consommation ostentatoire de produits de luxe ou d’importation. Elles précisent quels tissus doivent être portés, interdisent les broderies, les dentelles, les ornements en or ou en argent… Le but avoué est de protéger les industries nationales et la balance commerciale des pays.

▲à g. : Mariage de Louis de France, duc de Bourgogne et de Marie-Adélaïde de Savoie, le 7 décembre 1697,
par Antoine Dieu, Musée des châteaux de Versailles et de Trianon, Versailles,
sur Agence photographique de la RMN / ph. Daniel Arnaudet / Gérard Blot
en ht à dr. : Portrait en pied de Louis XIV âgé de 63 ans en grand costume royal (détail),
par Hyacinthe Rigaud, 1702, Musée des châteaux de Versailles et de Trianon, Versailles sur Wikipedia
en bas à dr. : Chaussures d’homme, troisième quart XVIIIe siècle, Palais Galliéra,
Musée de la mode de la ville de Paris sur Base Joconde

C’est Louis XIV, bel homme de sa personne mais de petite taille, qui lance la mode des chaussures à talons rouges, sa couleur préférée avec le marron. Cette mode se répand très vite, se poursuit sous Louis XV, et sans qu’aucun règlement ne le leur réserve expressément, seuls les grands seigneurs admis à la cour font peindre en rouge les talons de leurs chaussures.

▲à g. et au centre : Napoléon Bonaparte, premier consul, représenté devant une vue de la ville d'Anvers en 1803,
par Jean-Baptiste Greuze, 1803-1806,
Musée des châteaux de Versailles et de Trianon, Versailles sur Agence photographique de la RMN / ph. Gérard Blot
à dr. : Habit offert par la ville de Lyon au 1er Consul, 1800,
Châteaux et Musées Malmaison et Bois-Préau sur Agence photographique de la RMN

Sous le Consulat, Napoléon Ier, qui comprend l’importance économique de la production textile française, relance l’activité des soyeux lyonnais en leur faisant des commandes publiques. Ils le remercieront en lui offrant ce splendide habit de velours rouge (trop souvent exposé, il a aujourd’hui perdu ses couleurs d’origine) qu’il portera pour la signature du Concordat en 1800.

Les gentilhommes du duc d’Orléans dans l’habit de Saint-Cloud, par Félix Philippoteaux (1839)
d'après Louis Carrogis dit Carmontelle, 1770, Les Arts décoratifs, Musée Nissim de Camondo

Au fil des siècles, le costume est devenu une représentation politique de l’apparence selon la classe à laquelle on appartient, un enjeu de pouvoir qui permet aux puissants de maintenir leurs privilèges. En instituant une ségrégation vestimentaire qui frappe en priorité les bourgeois et les membres du commun, les lois somptuaires visent surtout à empêcher d’imiter l’aristocratie et à imposer une manière de se vêtir en fonction de la catégorie sociale à laquelle on appartient. Cependant elles ne sont guère efficaces, les bourgeois enrichis des sociétés urbaines et parisiennes préfèrent payer l’amende plutôt que de se plier aux interdits.

▲à g. : Ex-voto à Sainte-Geneviève offerte par la municipalité de la ville de Paris,
par Nicolas de Largillière, 1694-1696,
église Saint Etienne du Mont, Paris sur Wikimedia Commons
au centre : Portrait dit de Madame de Monginot et de son époux, attribué à François de Troy, 1710-1713,
Musée des Beaux-Arts, Nantes sur Agence photographique de la RMN / ph. Gérard Blot
à dr. : Conseiller de Paris, par Nicolas de Largillière, 1703, Detroit Institute of Arts

▲à g. : Portrait de Victor Marie d'Estrées, par Nicolas de Largillière, 1710,
collection privée sur Wikimedia Commons
à dr. : Habit d’homme, sur Base Joconde

▲à g. : Portrait d’Antoine Gaspard Grimod de la Reynière, par Maurice Quentin de La Tour, 1751,
Musée Lécuyer, Saint-Quentin sur Wikimedia Commons
au centre : Habit d’homme en velours rouge, France, vers 1750 1770, The Metropolitan Museum of Art
à dr. : Portrait de Nathaniel Sparhawk, par John Singleton Copley, 1764, Museum of Fine Arts, Boston

▲à g. : Portrait du tsar Paul Ier de Russie enfant, par Vigilius Eriksen, 1766
au centre : Portrait de François de Bourbon, par Madame Vigée Lebrun, 1790
à dr. : 1 Portrait de Charles William Lambton enfant, par Thomas Lawrence, 1825
sur Wikipedia

La souplesse, le brillant et le moelleux qui caractérisent le velours de soie rouge en feront pour longtemps encore le tissu le plus noble et le plus luxueux, signe d’opulence et de raffinement. La démocratisation du velours ne se fera qu’à partir du XIXe siècle, qui verra l’ouvrier revêtir le traditionnel pantalon largeot en velours côtelé de coton ou de laine pour sa chaleur et sa solidité, mais ceci est encore une autre histoire.



Voici, tout spécialement pour toi Sylvie, un choix de vêtements de velours rouge tous plus somptueux les uns que les autres. J’aurais bien aimé bien sûr te les offrir en vrai, mais il faudra que tu te contentes d’un essayage imaginaire ! Bon alors, on dirait que tu serais une princesse et que tu aurais tout ça pour de vrai dans tes armoires…

▲à g. : Portrait de la comtesse Sophie Marie de Voss à 16 ans, par Antoine Pesne, vers 1746,
Château de Charlottenburg sur Wikimedia Commons
à dr. : Casaquin de velours rouge, vers 1700-1725,
Palais Galliéra, Musée de la mode de la ville de Paris sur Base Joconde

▲à g. : Portrait de jeune femme dite Elisabeth de Beauharnais, par Nicolas de Largillière,
Musée de Grenoble, 1701-1711, sur Flickr
à dr. : Portrait de Marie-Antoinette, par Madame Vigée Lebrun, 1785,
Château de Konopiste sur le magnifique 18th century blog

▲à g. : Manteau de cour en velours de soie, vers 1804,
Châteaux et Musées Malmaison et Bois-Préau sur Agence photographique de la RMN
à dr. : Sacre de l’empereur Napoléon Ier et couronnement de l’impératrice Joséphine, le 2 décembre 1804, par Jacques Louis David, Musée du Louvre, Paris, sur Agence photographique de la RMN / ph. Hervé Lewandowski

▲à g. : Portrait de Madame de Senonnes, par Jean Auguste Dominique Ingres, 1814,
Musée des Beaux-Arts, Nantes sur Agence photographique de la RMN / ph. Gérard Blot
à dr. : Portrait de Louise, reine des Belges, par François Xavier Winterhalter, 1841 The Royal Collection, Londres

▲à g. : Madame Charles E. Inches (Louise Pomeroy), par John Singer Sargent, 1887,
Musée des Beaux-Arts de Boston
à dr. : Manteau Dolman de velours rouge, vers 1885, Victoria & Albert Museum, Londres

▲à g. : Cape en velours de soie rouge, Paul Poiret, vers 1920
à dr. : Cape en velours de soie rouge, Maison Worth, vers 1930-1940
The Metropolitan Museum of Art, New York

▲à g. : Manteau Cristobal Balenciaga, photographié par Richard Avedon, 1950, par divima_is_divine sur Flickr
à dr. : Manteau en velours de soie pour le soir, Cristobal Balenciaga, Automne-Hiver 1950-1951,
The Metropolitan Museum of Art New York

▲à g. : Ensemble jupe et caraco de velours rouge, Christian Dior, vers 1950, sur Rice and Beans Vintage
à dr. : Robe de velours rouge pour le soir, Christian Dior, photographiée par Sacha, 1957

4 commentaires:

  1. je n'ai qu'une robe de soirée, j'avais choisi le tissu : c'est une mousseline façonnée sur satin brillant rouge vif....Portée deux fois, la première en 1982. Rouge est ma couleur préférée ! J'ai pu admirer une merveilleuse robe avec manteau rouge dans la salle consacrée au "dernier bal" à l'exposition rétrospective d'Yves Saint-Laurent, au petit palais cet après-midi.....
    On aurait pu aussi évoquer les pantalons garance des soldats des premiers combats de la guerre de 14....

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  2. Le rouge a inspiré plusieurs de mes camarades pour leurs textes sur l'enfance, il semble bien être la couleur de l'enfance, et pas seulement pour les petits chaperons.

    Alors je compte en parler encore, cette fois de l'impression textile et des différents colorants... dont la garance.

    A suivre donc... Mais je vous sais fidèle sans avoir à faire de la réclame par avance !

    Quant à l'expo Yves Saint Laurent je n'ai pas encore eu le temps d'y aller, mais c'est prévu avant mon départ en vacances.

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  3. Bonjour,
    Votre blog est merveilleux, je le dévore avec grande passion.
    Grande admiratrice de Louis XIV, j'aimerai partager cette information que j'ai découverte lors de mes lectures : les talons rouges des hommes sont apparus suite à une mésaventure de Monsieur, le Duc Philippe d'Orléans ( le frère du Roi) qui revenant d'une fête à Paris au petit matin, dû passer par les quartiers des Halles, et plus particulièrement par les quartiers des bouchers. Etant celui que faisait la pluie et le beau temps de la mode versaillaise ( pour les hommes comme pour les femmes d'ailleurs), les courtisans crûrent à une nouvelle mode et immédiatement firent teindre leurs talons en rouge.
    J'espère que vous nous régalerai encore longtemps avec votre merveilleux blog :)

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    1. Bonjour Jozcan,

      Comme vous, j'adore ce genre d'anecdotes – mais je doute fort que celle-ci soit vraie. Essayez : trempez vos talons dans du sang, marchez quelques centaines de mètres, et encore nos rues bitumées sont-elles bien plus praticables que les chemins poussiéreux ou boueux de l'Ancien Régime, vos talons seront-ils vraiment rouges à faire pâlir d'envie à l'arrivée ?

      Les Petites Mains essaient justement de montrer combien les origines des modes sont complexes. D'après mes connaissances, ce serait Louis XIV et non son frère Philippe qui aurait lancé en France cette mode des talons de bois recouverts de cuir rouge, qui avait déjà cours en Angleterre sous le règne de Jacques Ier d'Angleterre. Le roi, de petite taille (à peine 1,65 mètre), avait l'habitude de porter des talons qui pouvaient atteindre dix à douze centimètres, afin de se grandir (ce serait aussi la raison de la création de la haute perruque in-folio bouclée). Outre le cuir rouge, ses talons étaient parfois décorés de scènes bucoliques ou militaires.

      Quant au rouge, en Occident, il est depuis l'Antiquité lié au pouvoir, sans doute en raison de la symbolique avec le feu et le sang. C'est, avec le marron, la couleur préférée du roi.

      Le protocole vestimentaire de la cour de Versailles est finalement assez strict et figé, plutôt contraignant, et les mini-phénomènes de mode de ce type ont toujours du succès, ne serait-ce que pour montrer qu'on fait partie de ce cercle très restreint. La mode des talons rouges se répand chez les courtisans et devient une marque des privilèges de l'aristocratie de cour. Elle est à rapprocher de celle de la coiffure « à la Fontanges » que Les Petites Mains ont aussi évoquée [http://les8petites8mains.blogspot.fr/2012/11/mode-enfantine-et-luxe-6-le-contexte.html].

      Merci de votre élogieuse appréciation qui bien sûr me fait plaisir. Je vois que vos goûts sont éclectiques, puisque vous avez aussi réagi à l'article sur le costume marin.

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